Mesdames et Messieurs les Chefs d’État et de gouvernement, Mesdames et Messieurs les Représentants permanents auprès des Nations unies,
C’est avec un grand soulagement que nous accueillons la nouvelle du cessez-le-feu, la libération des otages israéliens et de prisonniers palestiniens, ainsi que l’espoir de voir la fin des tueries, des destructions, des déplacements de populations et de la faim orchestrée à Gaza. Pourtant, cela ne doit faire aucun doute : ce cessez-le-feu est fragile. L’armée israélienne reste présente à Gaza, l’accord ne fait aucune mention de la Cisjordanie et l’occupation, l’apartheid ainsi que la privation de droits imposés aux Palestiniens sont passés sous silence.
La pression internationale a joué un rôle important dans l’instauration de ce cessez-le-feu, et elle doit perdurer pour qu’il tienne. Celui-ci doit être un début et non une fin. Le risque est trop grand de voir revenir une situation politique dans laquelle l’opinion publique est indifférente à l’occupation et le conflit permanent. Cette pression doit continuer pour ouvrir la voie à une nouvelle ère de paix et de justice pour tous – Palestiniens comme Israéliens.
La nécessité de réparation précède largement le 7 octobre 2023. Les crimes commis ce jour-là par le Hamas et d’autres factions armées nous ont horrifiés. Les actions israéliennes qui ont suivi ne peuvent pas être cautionnées. C’est le cœur meurtri et avec une immense douleur que nous voyons s’accumuler les preuves d’un génocide au sens de la loi. Certains tentent déjà de se dédouaner de leurs responsabilités et de rejouer des scénarios bien connus pour protéger leur impunité. Nous ne pouvons pas le tolérer.
Nous lançons donc cet appel en tant que Juifs venus de tous horizons, partout dans le monde. Nous réaffirmons notre conviction en l’universalité de la justice et l’égalité devant le droit international. Nous n’oublions pas que nombre des lois, chartes et conventions ont été créées pour sauvegarder et protéger toute vie humaine à la suite de la Shoah. Ces digues sont aujourd’hui implacablement brisées par les dirigeants actuels d’Israël. Ils doivent assumer leurs responsabilités dans les violations du droit international. Il est temps de tout faire pour mettre définitivement fin à la punition collective infligée par le gouvernement israélien aux Palestiniens et de rechercher la paix pour le bien des deux peuples.
En tant que Juifs et en tant qu’êtres humains, nous déclarons : pas en notre nom. Pas au nom de notre histoire, de notre foi, de notre tradition morale. Les tueries et les destructions à grande échelle, les déplacements forcés et la privation délibérée des biens de première nécessité, ainsi que les actions criminelles réalisées à l’heure actuelle en Cisjordanie doivent s’arrêter et ne jamais se répéter.
Nous déplorons le fait que les dirigeants israéliens aient, de manière répétée, pris la parole sur la scène internationale pour déclarer que ces actions sont commises au nom du peuple juif et d’une destinée manifeste juive. Le gouvernement israélien prétend parler au nom des Juifs dans leur ensemble, mais il ne parle pas en notre nom.
Cet affront à notre conscience collective ne peut être toléré. Il doit être contesté. Ce ne sont pas des valeurs juives. Ce ne sont pas non plus les leçons que nous tirons de l’histoire de notre peuple. Bien souvent, nous voyons dans celles et ceux qui se mobilisent pour les droits des Palestiniens le reflet de ceux qui, jadis, se sont tenus aux côtés des Juifs dans nos moments de détresse. Notre solidarité avec les Palestiniens ne constitue pas une trahison de notre judaïsme, mais la réalisation de celui-ci. Lorsque nos sages nous enseignent que détruire une vie, c’est détruire un monde entier, ils ne font pas d’exceptions pour les Palestiniens.
Nous resterons mobilisés jusqu’à ce que ce cessez-le-feu débouche sur la fin de l’occupation et de l’apartheid. Nous écrivons cette lettre dans l’espoir qu’elle impulse le renouveau d'une mobilisation juive agissant avec conscience et compassion. Nous allons travailler urgemment pour obtenir l’égalité, la justice et la liberté pour les Palestiniens et les Israéliens.
À cette fin, nous appelons le monde des affaires, les syndicats, la société civile et surtout les responsables et les États membres des Nations unies :Avec le plus grand respect et dans l’esprit de notre tradition juive commune,
- À respecter et appliquer les décisions de la Cour internationale de Justice et à remarquer qu’elles s’appliquent également à Jérusalem-Est et en Cisjordanie, à appliquer les mandats d’arrêt émis par la Cour pénale internationale et à contrer toute tentative visant à exercer des pressions indues sur le fonctionnement de ces Cours ;
- À refuser toute complicité dans les crimes et violations du droit international commis par Israël contre les Palestiniens, notamment par l’arrêt des ventes d’armes et d’autres biens et services, à utiliser leurs moyens de pression, notamment par des sanctions ciblées sur les organes gouvernementaux et les individus responsables des violations du droit international, et par la suspension des liens avec les entités commerciales qui contribuent à ces violations ;
- À prendre toutes les mesures nécessaires pour obtenir l’accès de l’aide humanitaire à tous les Palestiniens de Gaza à une échelle cohérente avec leurs besoins vitaux, la levée du blocus, l’entrée des matériaux de reconstruction sur le territoire, et le retrait total de l’armée israélienne ;
- À réfuter les fausses accusations d’antisémitisme, qui instrumentalisent abusivement notre histoire collective pour ternir celles et ceux aux côtés desquels nous œuvrons pour la paix et la justice.
Le collectif Jews Demand Action
Parlez-en à vos amis!